La mère de Jacob Blake, un Afro-américain de 29 ans grièvement blessé par des tirs policiers et probablement paralysé à vie, a appelé au calme mardi, les autorités redoutant de nouvelles manifestations tendues à travers les Etats-Unis.
“Mon fils se bat pour sa vie”, a déclaré, émue, Julia Jackson, mère de la victime, lors d’une conférence de presse.
“Si Jacob savait ce qu’il se passait, la violence et la destruction, il serait très mécontent (…) Nous avons besoin de guérir”, a-t-elle ajouté alors que son fils était à nouveau au bloc opératoire.
Comme pour George Floyd, un quadragénaire noir mort asphyxié sous le genou d’un policier blanc il y a trois mois, la tentative d’interpellation de Jacob Blake a été filmée par un témoin dimanche à Kenosha, dans l’Etat du Wisconsin.
Les images montrent le jeune Afro-américain suivi par deux policiers ayant dégainé leurs armes alors qu’il contourne une voiture.
Un agent attrape son débardeur blanc au moment où il ouvre la portière et tente de s’installer sur le siège conducteur. Le policier fait alors feu –l’enregistrement laisse entendre sept tirs–, atteignant ce père de famille de plusieurs balles dans le dos.
“Le diagnostic médical pour le moment est qu’il est paralysé”, a affirmé l’avocat de la famille de M. Blake, Ben Crump.
Il a subi de “graves dommages corporels, dont une section de la moelle épinière”, ses reins et son foie ont été endommagés et ses blessures ont nécessité “l’ablation d’une partie de l’intestin”, a précisé l’avocat Patrick Salvi, lui aussi sur le dossier.
La famille de Jacob Blake va porter plainte au civil, a-t-il annoncé.
Les avocats ont par ailleurs annoncé qu’ils se rendraient à Washington vendredi pour rejoindre une vaste marche contre les violences policières organisée le jour de l’anniversaire du célèbre discours de Martin Luther King “I have a dream” (J’ai un rêve).
– “Pas de justice, pas de paix” –
Kenosha, Minneapolis, New York ou Portland, plusieurs villes américaines sont devenues depuis deux jours le théâtre de rassemblements parfois violents, des milliers de personnes exigeant que justice soit faite pour Jacob Blake.
Dans la nuit de lundi à mardi, les manifestants scandaient le même slogan qu’après la mort de George Floyd, il y a trois mois jour pour jour: “Pas de justice, pas de paix”.
“Si je tuais quelqu’un, je serais condamnée et traitée comme une meurtrière. Je pense que ce devrait être la même chose pour la police”, a dit à l’AFP Sherese Lott, 37 ans, venue dire sa colère lundi soir à Kenosha, ville de 170.000 habitants au bord du lac Michigan.
Le millier de manifestants réunis devant un tribunal de la ville ont d’abord défilé pacifiquement. Mais une heure après l’entrée en vigueur d’un couvre-feu, des échauffourées ont éclaté avec les forces de l’ordre.
Les manifestants ont lancé des bouteilles et des feux d’artifice vers les policiers, incendié des voitures et un immeuble. Ils ont été visés par des capsules de gaz lacrymogène et des projectiles tirés par la police, a constaté l’AFP.
Des grilles en fer avaient été installées mardi sur les lieux pour éviter les débordements de la veille.
“Ce que nous avons vu ces deux dernières nuits et de nombreux soirs cette année est l’expression de la douleur, l’angoisse et l’épuisement d’être Noir dans notre Etat et notre pays”, a estimé mardi le gouverneur démocrate du Wisconsin Tony Evers.
Il a réitéré ses appels à des manifestations pacifiques et annoncé que des soldats supplémentaires de la Garde nationale seraient envoyés sur place en renfort.
A Minneapolis, la ville où George Floyd est mort le 25 mai et lieu de départ du mouvement historique contre le racisme, les manifestants ont brûlé un drapeau américain.
Environ 200 personnes ont défilé à New York. A Portland, où des marches sont organisées quasi quotidiennement depuis la mort de George Floyd, les manifestants ont scandé le nom de Jacob Blake.
Ben Crump, l’avocat de la famille de Jacob Blake, a affirmé que les trois fils de ce dernier se trouvaient dans la voiture au moment du drame, et que le jeune homme avait tenté de s’interposer dans une dispute entre deux femmes.
Les deux policiers impliqués ont été suspendus de leurs fonctions et une enquête a été ouverte.
Le président Donald Trump ne s’est pas encore exprimé sur le sujet. Joe Biden, son opposant démocrate à la présidentielle de novembre, a quant à lui assuré que le racisme était “une crise de santé publique” et exigé une enquête fouillée et transparente.